1975-2004 : Lotus Esprit
Description
La Lotus Esprit est l’un des modèles les plus emblématiques jamais produits par la marque Lotus, un modèle qui aura connu de très nombreuses versions lui assurant une longévité exceptionnelle. Née en 1975 comme un coupé à moteur 4 cylindres de 160 chevaux, elle finira sa carrière en 2004 comme un coupé à moteur V8 bi-turbo de 350 chevaux !
1975-1981 – Premières séries, Lotus type 79, de la S1 à la S2.2
Lorsque Colin Chapman décida à la fin des années 60 d’étudier une nouvelle gamme de véhicules plus cossue, trois projets furent initiés : le projet M50 qui donnera naissance à la Lotus Elite, le projet M52 qui donnera naissance à la Lotus Eclat, puis l’Excel, et enfin le projet M70 qui devait être le successeur de la Lotus Europa, mais en version plus « haut de gamme ».
Le temps et l’argent manquèrent pour faire avancer le projet M70, si bien que lors du salon de Genève 1971, rien n’avait vraiment avancé lorsque Colin Chapman visita le stand du carrossier Ital Design. Giorgetto Giugiaro y présentait la maquette de la Maserati Boomerang, un concept car qui impressionna Chapman au point qu’il demanda au designer Italien s’il lui serait possible d’imaginer un projet similaire pour Lotus. Giugiaro accepta et lui dit « envoyez moi simplement un châssis et je m’en occupe ». Un châssis roulant d’Europa Twin-Cam fut modifié pour reprendre les empattements et voies envisagées pour le projet M70 et envoyé en Italie. Un an plus tard, la foule fut sidérée par le concept car présenté sur le stand Ital Design lors du salon de Turin, aux côtés de la Boomerang désormais fonctionnelle : le prototype Lotus Esprit était impressionnant, et l’accueil du public fut à ce point enthousiaste que la décision de mettre en production cette voiture fut prise.
Il ne fallut pas moins de 3 années pour passer du modèle de salon au modèle de production, et la nouvelle Lotus Esprit « Série 1 » (dénommée ainsi rétroactivement) était présentée en grande pompe au Salon de Paris en Octobre 1975. Si cette voiture ne partage pas un seul panneau de carrosserie avec le projet initial, la filiation est évidente, tant vu de l’intérieur que de l’extérieur.
L’Esprit S1 (Lotus Type 79) est donc un coupé deux places à moteur central et aux roues arrières motrices. Il est équipé du nouveau moteur Lotus type 907, un quatre cylindres de 2,0 Litres à 16 soupapes produisant 162 CV DIN via deux carburateurs double corps horizontaux Dell’Orto DHLA 45. Le moteur est monté longitudinalement à l’arrière des sièges et est accouplé à une boîte à 5 vitesses provenant de la Citroën SM, boîte contre laquelle sont collés les freins à disques arrière, comme une vraie F1 !
Comme c’est alors la règle chez Lotus, la voiture est architecturée autour d’un châssis poutre supportant le moteur, les suspensions et la carrosserie. Cette dernière est en composites fibre de verre/résine de polyester et est principalement constituée de deux demi carrosseries séparées selon un plan horizontal, chaque moitié étant produite selon le procédé d’injection VARI. Les jantes proviennent de chez Wolfrace.
Cette première version de la Lotus Esprit est la plus pure en ligne, seul un petit becquet discret sous le nez venant compléter le trait de crayon initial du designer Italien pour des raisons d’équilibre aérodynamique à haute vitesse.
L’Esprit de première génération n’est pas exempte de petits défauts, dont un confort de roulage assez moyen en raison de vibrations persistantes, et la mécanique souffre d’un refroidissement moteur très moyen. Par ailleurs, les performances réelles sont assez moyennes (on peine à atteindre les 200 km/h) et le moteur est très « pointu ». La situation va un peu s’améliorer en 1977 lorsque de nouveaux arbres à cames vont être montés, mais on est encore loin de la perfection, si bien qu’une « Série 2 » apparaît dès 1978, après que 714 exemplaires de la S1 aient été vendus (dont 478 aux USA).
L’Esprit S2 se distingue essentiellement par l’apparition d’écopes de refroidissement moteur derrière les vitres latérales et par une lèvre aérodynamique sous le nez désormais enveloppante. Plusieurs autres petites évolutions rendent la vie à bord plus agréable.
Cette Série 2 est complétée d’une série limitée dite « World Champion Limited Edition » aux couleurs noir et or afin de célébrer le titre de Champion du Monde de F1 du Team Lotus et de Mario Andretti
La S2 est produite jusqu’en 1981 et sera vendue à 1060 exemplaires (dont 400 aux USA) auxquels il faut ajouter 147 exemplaires de la série limitée. En fin de production de la S2 est introduite une version appelée S2.2 : il s’agit ni plus ni moins d’une S2 sur laquelle a été monté le moteur type 912 de 2,2 litres de cylindrée, commun aux Elite et Eclat S2.2. Autre évolution importante : le châssis en acier est désormais galvanisé, au bénéfice d’une bien meilleure longévité. Seules 88 Esprit S2.2 seront fabriquées, dont seulement 13 seront vendues hors de Grande-Bretagne !
1981-1990 Lotus atmosphérique « Série 3 » atmosphérique type 85
En 1981 apparaît une évolution sensible de la Lotus Esprit, qui motive une évolution de type. La Lotus Esprit est désormais disponible en deux versions : une à moteur atmosphérique, l’autre à moteur Turbo (voir paragraphe suivant). La Lotus S3 « type 85 » est la version atmosphérique. Elle hérite de plusieurs évolutions conçues pour la version turbo : châssis renforcé, suspensions plus efficaces, freins plus gros, et montage du moteur plus souple mettant un terme aux vibrations des modèles précédents. La carrosserie évolue également avec des écopes de refroidissement plus grandes, des pare-chocs plus proéminents et un spoiler avant enveloppant. Le millésime 1987 voit apparaître en série le moteur dit « HC » à haut taux de compression, une modification qui fait monter la puissance à 172 ch DIN.
Fin 1987 apparaît une toute nouvelle carrosserie dont le dessin original par Giugiaro a été adouci par le nouveau responsable de Lotus Design : Peter Stevens. Le châssis (désormais appelé « châssis Eagle ») est également revu pour permettre le montage d’une boîte Renault en lieu et place de la boîte Citroën, les freins arrière revenant dans les roues. Les suspensions évoluent principalement dans leurs réglages. Enfin, l’Esprit atmosphérique change de nom et ne s’appelle plus « Lotus Esprit S3 » mais simplement « Lotus Esprit ».
Il sera produit au total 767 Lotus Esprit S3 atmosphériques (carrosserie Giugiaro) et 290 « Lotus Esprit » (carrosserie Stevens), la dernière sortant d’usine en 1990.
1980-1992 Lotus Esprit Turbo type 82 à carburateurs
Lotus abandonne l’idée d’équiper sa Lotus Esprit du V8 prévu initialement, car trop cher à étudier et produire, et se rabat sur la technologie du turbocompresseur pour améliorer les performances de sa voiture, sans pour autant passer à l’injection, mais en conservant des carburateurs Dell’Orto désormais « soufflés ». La première Esprit Turbo sort en 1980 sous forme d’une série limité « Essex », du nom du sponsor principal du Team Lotus de F1. Mais dès 1981, l’Esprit Turbo devient un modèle standard de la gamme. Les performances grimpent en flèche : le moteur délivre désormais 210 ch DIN, la vitesse de pointe atteint 240 km/h et le 0 à 100 est atteint en 6,1 secondes. Dès 1987, les Esprit Turbo sont équipées de la version compressée du moteur HC, qui délivre désormais 215 CV DIN.
En 1987, l’Esprit Turbo à carburateurs adopte elle aussi la nouvelle carrosserie « Peter Stevens », la boîte de vitesses Renault, et le nouveau châssis Eagle. Elle continuera à être produite avec de légères évolutions d’équipement jusqu’en 1992, bien que dépassée alors par les versions à injection.
Au total, il sera produit 1658 Esprit Turbo à carburateurs et carrosserie « Giugiaro » jusqu’en 1987, dont 45 en version « Essex » en 1980. Par la suite, il sera fabriqué 616 Lotus Esprit Turbo à carburateurs et carrosserie « Stevens ».
1985-1998 Lotus Esprit Turbo type 82 à injection
L’apparition de l’injection sur les Lotus Esprit fut la résultante de normes anti-pollution de plus en plus contraignantes, notamment aux USA. L’Esprit Turbo évolue donc avec les modèles suivants (tous catalysés) :
1985-1988 : Esprit Turbo « HCI » équipée du moteur haute compression et d’injection Bosch K-Jetronic, développant 215 chevaux à 6250 trs/mn et 30,4 m.kg de couple à 4250 trs/mn. 407 exemplaires en carrosserie Giugiaro et 474 exemplaires en carrosserie Stevens. Vitesse de pointe 240 km/h et 5,5 secondes au 0 à 100 km/h. 881 exemplaires fabriqués.
1988-1991 : Esprit Turbo « MPFI » utilisant le calculateur injection/allumage cartographique GMP4 de GM Delco, développant 228 chevaux à 6500 trs/mn et 30,2 m.kg de couple à 4000 trs/mn. 252 exemplaires tous en carrosserie Stevens, pratiquement tous vendus aux USA (seuls quelques unités vendues en Grande-Bretagne sous l’appellation « Lotus Esprit S »). Vitesse de pointe 240 km/h et 5,2 secondes au 0 à 100 km/h. 252 exemplaires fabriqués.
1989-1993 : Esprit Turbo SE puis Esprit Turbo Chargecooler. Ajout d’une échangeur de température air-eau pour l’air d’admission. 264 cv DIN à 6500 trs/mn (285 CV en mode overboost temporaire) et 36,0 m.kg de couple à 3900 trs/mn. L’Esprit entre dans le monde des supercars ! Vitesse de pointe 262 km/h et 5,0 secondes au 0 à 100 km/h. 1608 exemplaires fabriqués.
1992-1995 : Esprit S4 : Retouches de carrosserie par Russell Carr, jantes plus grandes et nouvelle fonderie moteur plus résistante. 264 cv DIN à 6500 trs/mn (285 CV en mode overboost temporaire) et 36,0 m.kg de couple à 3900 trs/mn. Vitesse de pointe 263 km/h et 5,2 secondes au 0 à 100 km/h. 316 exemplaires fabriqués.
1993-1996 : Esprit Sport 300 : Modèle d’homologation pour la voiture ayant participé aux 24 Heures du Mans 1993 et 1994. Beaucoup de modifications augmentant la performance (châssis, moteur, suspensions, freins, carrosserie…). 306 cv DIN à 6400 trs/mn et 39,7 m.kg de couple à 4400 trs/mn. Vitesse de pointe 261 km/h et 4,8 secondes au 0 à 100 km/h. 64 exemplaires fabriqués.
1994-1996 : Esprit S4s : Beaucoup d’évolutions de la Sport 300 avec le confort de la S4. 285 cv DIN à 6400 trs/mn (305 CV en mode overboost temporaire) et 40,2 m.kg de couple à 4100 trs/mn. Vitesse de pointe 261 km/h et 5,1 secondes au 0 à 100 km/h. 361 exemplaires fabriqués.
1995-1998 : Esprit GT3 : Moteur 2,0L, allégée, intérieur « course ». 240 cv DIN à 6250 trs/mn (262 CV en mode overboost temporaire) et 30,0 m.kg de couple à 3750 trs/mn. Vitesse de pointe 256 km/h et 5,3 secondes au 0 à 100 km/h. 196 exemplaires fabriqués.
1991-1992 : Esprit x180R Type 105 et 106 : La Lotus Esprit Turbo SE est engagée dans les championnats GT Américains « SCCA World Challenge » et « IMSA Supercars » aux cours des année 1991 à 1995. La Lotus Type 105 correspond aux version purement compétition de cette voiture, dont 5 exemplaires environ ont été produits. La Lotus Type 106 est une version routière très proche de la version de course mais homologué pour la route qui a été vendue aux USA à 22 exemplaires en 1992 pour célébrer la victoire du pilote Doc Bundy en SCCA World Challenge en 1991.
1995-2004 : Lotus Esprit V8
La Lotus Esprit termine sa carrière en étant enfin équipé du moteur qu’elle attendait depuis sa présentation, en l’occurrence un V8 de 3,5 Litres gavés par deux turbos, développant 350 cv à 6500 trs/mn et 41 m.kg ) 4250 trs/mn. Ce moteur n’a rien à voir avec le type 909 évalué à ses débuts. Sa puissance, somme toute, modeste s’explique par la limitation en couple absorbable par sa boîte d’origine Renault, la même qui équipait les versions à 4 cylindres.
Les performances restent exceptionnelles, avec 280 km/h en pointe, et 4,2 secondes pour exécuter le 0 à 100 km/h.
L’Esprit V8 se pare progressivement des équipements les plus évolués, dont un freinage très performant. A noter la version Sport 350 de 1999, spectaculaire dans ses équipements mais dotée du même moteur que la version normale. La Lotus Esprit V8 sera fabriquée à 1571 exemplaires
La dernière Lotus Esprit quitte l’usine de Hethel en 2004 après 29 ans de carrière et un total de 10 611 exemplaires vendus (hors voitures de compétition).