1966-1975 : Lotus Europe & Europa
Description
La Lotus Europe à moteur Renault & Lotus Europa à moteur Lotus Twin-Cam dont il est question ici est la première série de Lotus sorties sous ce nom, fabriquées entre 1966 et 1975. Il ne faut pas la confondre avec les Lotus Europa « S » et « SE » à moteur Opel, qui seront produites par Lotus entre 2006 et 2010.
La Lotus Europe de 1966 est le produit que Colin Chapman imagina pour amener sur la route la technologie de propulsion à moteur central qu’il faisait triompher sur circuit depuis des années. Une telle architecture n’avait jamais été vraiment utilisée pour un véhicule de grande diffusion, aussi le challenge était important.
L’architecture de sa nouvelle voiture reprenait cependant le principe d’un châssis poutre en acier, qui sera habillé d’une caisse formée d’un soubassement et d’une carrosserie en composite de polyester armé de fibre de verre.
Pour la motorisation, Chapman choisit de changer sa politique passée qui consistait à ne prendre que des groupes d’origine Ford. Il fut immédiatement intéressé par le nouveau groupe motopropulseur que venait de présenter Renault pour sa nouvelle Renault 16. Il s’agissait d’un tout nouveau moteur tout en aluminium avec des chemises en acier, un 1,470 cc (1.5 L) que Renault utilisait à l’avant de sa voiture avec la boîte de vitesse située en avant du moteur. Il suffisait donc à Colin Chapman de retourner le moteur de 180° et le placer à l’arrière de sa nouvelle voiture pour obtenir un moteur central prolongé par la boîte de vitesses (après avoir modifié le pont pour que le moteur tourne dans le bon sens). Certes, ce moteur était un simple arbre culbuté, mais avec soupapes en tête.
Qui plus est, Renault allait modifier son moteur pour en tirer de meilleures performances sur la Lotus : un taux de compression plus élevé (10,25:1 au lieu de 8,6:1), de plus grandes soupapes d’admission, un arbre à cames spécial, le doublement des ressorts de soupapes et un carburateur double corps. Ces modifications permettaient au moteur de développer 82 ch (61 kW) à 6,000 trs/mn au lieu des 63 ch de la Renault 16.
La ligne de la Lotus Europe est due au crayon de Ron Hickman, qui avait déjà oeuvré sur la Lotus Elan. A première vue, elle ressemble à une Ford GT 40 en miniature, avec un avant très éfilé et une partie arrière plus massive se terminant en profil de Kamm. Ce qui frappe, c’est la faible hauteur de l’ensemble comparé à sa hauteur et sa largeur. A l’intérieur, le pilote doit adopter une position de conduite très couchée : le terme de « Formule 1 » de la route qui sera utilisé dans certaines publicités n’est pas usurpé !
Les principaux modèles qui furent commercialisés sont les suivants :
1963-1967 : Lotus Europe « Série 1 » (Lotus Type 46)
Cette première série est en fait la version la plus frustre de la voiture. La règle de Chapman consistant à enlever tout ce qui n’était pas absolument nécessaire a été appliquée à la lettre. Ainsi, le soubassement de la caisse en fibre de verre est-il collé au châssis poutre, ce qui est très bon pour la rigidité, mais devient très problématique dès lors qu’après quelques années, ce châssis rouille, d’autant plus que ce montage maintient un certain taux d’humidité sur les surfaces en contact.
Par ailleurs, les vitres sont fixes, de même que les sièges. Pour ajuster sa position, il faut bouger le pédalier, ce qui nécessite un démontage de celui-ci avec des outils ! Il n’y a pas non plus de poignées de porte à l’intérieur, et la finition est très simple, avec une plaque en alu en guise de tableau de bord.
L’Europe S1 pesait seulement 610 kg pour une vitesse maximale de 195 km/h et une accélération de 0 à 60 mph en 9,3 secondes, tout en ayant une tenue de route phénoménale pour l’époque et une taille de pneus mesurée.
La voiture se vend à 296 exemplaires avant que quelques modifications de confort soient apportées (versions S1A puis S1B), les vitres latérales devenant amovibles pour se ranger dans l’épaisseur de porte, le tableau de bord est également recouvert de bois. Au total 644 S1 toutes versions seront produites.
1968-1970 : Lotus Europe « Série 2 » (Lotus Type 54)
La série 2 apporte un certains nombre de correctifs aux problèmes rencontrés par les clients avec la série 1. Tout d’abord, le soubassement de la caisse est désormais boulonné au châssis et non plus collé. Cela ne ralentit pas la rouille, mais rend les opérations de maintenance voire de remplacement du châssis tout simplement faisables.
Luxe suprême, la voiture dispose de vitres descendantes à commande électrique, des sièges ajustables, un intérieur recouvert de moquette et un tableau de bord en bois de meilleure facture.
Le moteur étant inchangé, les indicateurs de performance restent identiques à ceux de la Série 1.
1968-1970 : Lotus Europe « Série 2 » Fédérale (Lotus type 65)
La règlementation Américaine impose des hauteurs minimales pour les feux que la version Européenne ne pouvait pas respecter. Pat ailleurs, la règlementation Américaine est également plus restrictive en matière de normes de pollution des moteurs. Cela a motivé Lotus à développer une versions spécifique de l’Europe à destination des Etats-Unis, avec des réglages de suspensions relevant la hauteur de caisse et un moteur différent. Le moteur utilisé est celui de la Renault 16 TS, qui cube 1 565 cm3 au lieu de 1470, ce qui lui permettait de développer tout de même 80 ch malgré la perte de rendement lié à la dépollution nécessaire.
1971-1975 : Lotus Europa Twin-Cam et Lotus Europa Special (Lotus Type 74)
En 1971, la Lotus Europe évolue de façon significative en adoptant le moteur Ford Twin Cam de 1557cc développant 105 Ch et déjà présent sur la Lotus Elan. La boîte reste de provenance Renault, mais un modèle plus robuste est employé. La ligne de la voiture est également altérée au niveau des montants arrière afin de dégager la visibilité.
Aux USA, la Lotus Europa Special « Federal » est d’emblée équipée du moteur « Big Valves » dans sa version dépolluée et de la boîte 5.
L’évolution suivante en Europe consista à monter le moteur Twin Cam « Big Valves » développant 126 ch en étant muni de deux carburateurs double corps Dell’Orto 40 DHLA. La voiture ainsi gréée est renommée « Europa Special » et commence par une série limitée de 100 voitures peintes en noir avec liseré or pour commémorer la victoire au championnat du monde 1972 du Team Lotus. Ces voitures disposaient toutes d’une boîte de vitesses Renault à 5 rapports et d’une plaque numérotée sur le tableau de bord.
L’Europa Special continuera d’être proposée au delà de cette série limitée, éventuellement avec le schéma de décoration avec liserés or mais sans la plaque commémorative et avec une boîte à 4 vitesses, la boîte 5 étant une option payante.
L’Europa Special a vu son poids grimper à 740 Kg, mais les nouvelles prestations de son moteur lui permettent de flirter avec les 200 km/h et d’abattre le 0 à 60 mph en 6,6 secondes, une progression spectaculaire par rapports aux premiers modèles à moteur Renault.
Au total 9 230 Lotus Europe, Lotus Europa Twin Cam et Special sont sorties des ateliers de Hethel.
1967-1968 : Versions Compétition (Lotus Type 47 GT)
Il était évident que la Lotus Europa avait des prédispositions à la compétition compte tenu de son architecture inspirée de la course. Mais la vraie voiture de course inspirée de la Lotus Europe était en fait très différente d’une version routière : non seulement était-elle équipée du moteur Ford Twin-Cam dans une version préparée, mais également d’une boîte de vitesses Hewland à crabots et d’un train arrière complètement triangulé provenant d’une F2 ! Il a été construit environ 55 exemplaires de l’Europa 47 GT qui s’illustrèrent dans de très nombreuses courses sur tous les continents. Une Lotus 47 GT fut notamment engagée aux 24 heures du Mans 1967 par l’Ecurie Elite.
Des versions « usine » coururent en Grande-Bretagne en 1967, dont une avec deux prises d’air au dessus du capot arrière qui fut immédiatement nommée la « Snorkel », puis en 1968 une écurie d’usine courait dans le championnat GT Anglais aux couleurs Gold Leaf Team Lotus, celles de l’équipe de F1 de la marque !